Résumé

Cet article analyse « ce que la montagne fait » aux personnes qui demandent l’asile en Suisse. Il s’intéresse à leur vécu lorsqu’elles sont hébergées dans des foyers d’accueil collectifs, en altitude. À l’échelle de la société suisse, les demandeur·es d’asile sont soumis·es à une injonction d’« intégration », malgré l'issue incertaine de leur requête. Lorsque l’attente et l’incertitude imposées par la procédure d’asile se vivent à plus de 1 300 mètres d’altitude, le sentiment d’être tenu à l’écart de la vie des centres urbains est renforcé et la charge émotionnelle exacerbée. Les expériences spécifiques de l’hébergement collectif en montagne, éprouvées par les requérant·es d’asile – et par les professionnel·les ou bénévoles qui les accompagnent – s’expriment dans leurs façons de dire le lieu. Loin des représentations touristiques et romantiques de la montagne, les oppositions entre le haut et le bas (la vallée et la plaine), entre la périphérie et le centre (la montagne et la ville) traversent avec récurrence les récits recueillis. Elles entretiennent une représentation de la montagne comme un non-lieu de vie sociale, un endroit isolé, par opposition aux villes en plaine. Lorsque l’accueil « en haut » se prolonge, il nourrit un processus d’effacement social « en bas » qui rend l’injonction à l’intégration dans la société suisse éminemment paradoxale.

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